Actualité du mois de septembre – Ce qu’il ne fallait pas manquer en Droit social

Des propos injurieux envers son employeur tenus dans le cadre d’une conversation privée sur Facebook ne peuvent motiver un licenciement disciplinaire

Les faits : Une salariée a été licenciée pour faute grave pour avoir diffusé sur Facebook des propos injurieux à l’encontre de son employeur. Elle conteste la rupture estimant que les propos en cause étaient accessibles uniquement à un groupe privé de quatorze personnes et relevaient donc de sa vie privée.

La question posée à la cour de cassation : Des propos injurieux tenus sur Facebook envers son employeur dans le cadre d’un groupe fermé et restreint constituent-ils une cause réelle et sérieuse de licenciement ?

Non, selon la cour de cassation : « Mais attendu qu’après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site facebook et qu’ils n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, la cour d’appel a pu retenir que ces propos ne caractérisaient pas une faute grave ; » (Cass. soc.,12 sept. 2018 n° 16-11.690).

Ce qu’il faut retenir :  Des propos, même injurieux, d’un salarié à l’égard de son employeur ne peuvent constituer un motif de licenciement disciplinaire dès lors qu’ils ont été tenus « en privé ».

Cependant, la Cour ne définit pas la notion de « nombre limité de personnes » permettant de considérer que les propos relèvent de la sphère privée. De même, elle ne s’attarde pas sur la qualité des personnes composant le groupe de discussion. Si cette qualité était prise en compte, une solution différente pourrait être envisagée, par exemple si le groupe est composé de salariés de l »entreprise. Enfin, au-delà du licenciement disciplinaire, rappelons que des faits de la vie privée entraînant un trouble objectif au sein de l’entreprise peuvent le cas échéant constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Cette décision ne confère donc pas à mon sens une immunité de parole aux salariés.

Obligation d’adaptation et licenciement économique

Le manquement à l’obligation d’adaptation du salarié lui cause un préjudice distinct de son licenciement mais ne prive pas celui-ci de cause réelle et sérieuse

Les faits : Une salariée a été licenciée pour motif économique. Elle conteste son licenciement estimant qu’un reclassement aurait été possible si l’employeur avait veillé à son obligation d’adaptation non respectée depuis 20 ans.

La question posée à la cour de cassation : Le manquement à l’obligation d’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi prive-t-il de cause réelle et sérieuse le licenciement pour motif économique?

Non, selon la cour de cassation : « Qu’en statuant ainsi alors que le manquement, par l’employeur, à son obligation d’adapter le salarié à l’évolution de son emploi et à sa capacité d’occuper un emploi au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations cause au salarié un préjudice spécifique et n’a pas pour effet de priver de cause réelle et sérieuse un licenciement pour motif économique ; » (cass. soc., 12 sept. 2018, n° 17-14.257)

En conclusion : Le manquement à l’obligation d’adaptation ne peut être invoqué par les salariés pour contester leur licenciement pour motif économique, ce qui constitue plutôt une « bonne nouvelle » pour les employeurs, bien que cette décision ne m’apparaisse ni constructive ni particulièrement logique. Ceci étant, le pendant de cette solution est nécessairement le cumul possible des indemnités par le salarié dans la mesure où elles réparent des préjudices considérés distincts.

Heures supplémentaires

L’accord de l’employeur peut être implicite

Les faits : Une salariée demande le paiement d’heures supplémentaires. L’employeur conteste au motif qu’il n’a ni sollicité ni accepté la réalisation des heures supplémentaires. La salarié argue du fait que l’employeur les avait implicitement acceptées, compte tenu des circonstances de l’espèce.

La question posée à la Cour de cassation :  Dans quelles circonstances l’accord implicite de l’employeur pour la réalisation d’heures supplémentaires peut-il être retenu?

Selon la cour de cassation : « Mais attendu que la cour d’appel, en constatant que la gérante de la société avait été alertée du surcroît d’activité auquel devait répondre la salariée ainsi que de la nécessité de revoir l’organisation de l’entreprise afin de la soulager et qu’aucun changement organisationnel n’était postérieurement intervenu, a fait ressortir que les heures supplémentaires avaient été réalisées avec l’accord implicite de l’employeur, justifiant ainsi sa décision ; » (cass. soc., 12 sept. 2018, n° 17-15.924).

Ce qu’il faut retenir : L’employeur ne peut se retrancher derrière l’absence de demande expresse pour refuser le règlement d’heures supplémentaires. La Cour de cassation condamne ainsi la « politique de l’autruche  » de certains employeurs. Si la réalisation de ces heures est réellement indésirable, je préconise par conséquent de formaliser le refus en demandant expressément au salarié de ne pas ou de ne plus travailler au-delà de la durée légale du travail. Le salarié ne pourra alors pas « passer en force » pour la réalisation d’heures supplémentaires.